CELINE  ROSA  ANNA  DUPUIS

L'histoire d'une famille qui raconte un peu de notre Europe.

 

 

À l'instar de la joyeuse équipée de Little Miss Sunshine, ce film embarque en camping-cars mes oncles, tantes et cousins aux tempéraments picards bien trempés à la rencontre de la famille des Carpates de Rosa, la grand-mère d'origine ukrainienne, en passant par l'Allemagne et la Pologne.

 

Avec ce voyage qui promet d'être animé, le film propose une exploration décalée de l'Histoire européenne par le prisme des secrets de l'histoire de la famille Dupuis Struk, ma branche paternelle. À la recherche du camp en Allemagne où était prisonnier Charles Dupuis au mystère du cimetière de Cemeguinow où Mikhaïl Struk n'est pas enterré avec sa femme Katarina Olynyk mais dans la "fosse commune" (ou serait-ce un charnier ?), l'enquête familiale interroge l'Histoire chahutée du continent par les différents regards des générations à bord. Ce miroir du temps éclaire en même temps l'actualité du continent en lutte avec ses vieux démons.

 

Jusqu'à la chute du Mur de Berlin, Rosa Struk, ma grand-mère paternelle, était polonaise. Enfin c'est ce que tout le monde disait. Arrivée juste avant la seconde guerre mondiale avec un permis de travail polonais, il faudra attendre la perestroïka pour révéler qu'elle était ukrainienne. Née le 16 janvier 1916 non loin de Stryi au pied des Carpates, la région est à sa naissance sous le contrôle de l'empire austro-hongrois. Territoire frontalier (Ukraina veut dire "confins"), les terres noires ont toujours été très convoitées. Avec l'effondrement de l'empire des Habsbourg, la population ukrainienne et juive proclame Lviv capitale de la très éphémère République populaire d'Ukraine occidentale le 1er/11/1918. Mais les Polonais reprennent rapidement le contrôle de la ville. S'ensuit une guerre polono-soviétique. Après la paix de Riga, la ville devient la capitale de la voïvodie de Lwow et 3ème plus grande ville de Pologne. Profitant de la Convention d'émigration franco-polonaise du 3 septembre 1919, ma grand-mère signe un contrat de travail d'un an pour travailler dans les champs de Picardie et arrive en France en 1939.

 

En septembre, la seconde guerre mondiale éclate. Les fermiers chez qui travaille Rosa la font passer pour muette face aux militaires nazis qui occupent le village, dont un officier qui est très amoureux d'elle. À l'armistice, elle rencontre mon grand-père, picard au regard bleu acier, qui menace de se pendre si elle ne l'épouse pas. Rosa cède à l'amour d'Alfred. Mais Charles, mon arrière-grand-père (qui jamais ne nous saluera) est opposé au mariage. Il vide le compte en banque de son fils la veille de ses 21 ans, âge de sa majorité, et le renie. C'est que Charles garde du ressentiment pour tout étranger venant de l'Est depuis qu'il a été fait prisonnier en Allemagne lors de la 1ère guerre mondiale. Pour éviter que les Noces ne s'ébruitent, le maire ne publie pas les bans, triche sur les papiers de ma grand-mère et célèbre en très petit comité l'union secrète. Quelques mois plus tard, ma grand-mère est naturalisée. La guerre terminée, le rideau de fer sépare le continent en deux pour quarante ans, deux générations. Rosa ne reverra jamais ses parents tués pendant la guerre.

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Le documentaire propose une exploration du siècle à travers le regard des enfants et petits-enfants de Rosa. Les souvenirs de chacun interrogent la grande Histoire de la guerre à la réconciliation franco-allemande, des camps de prisonniers aux voyages d'études de la classe de première langue allemand en Allemagne, des premières images en Pologne juste avant la chute du Mur aux mystères des terres noires de l'Ukraine.

 

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